Les Ateliers CLIMAT - Réduction et verdissement de la flotte

Dans le cadre de l'animation du Plan Climat de la Métropole, l'ALEC a proposé jeudi 18 septembre 2025 une demi-journée de partage et d'échanges dédiée ​au sujet de la réduction et du verdissement des flottes de véhicules et déplacements professionnels en collectivité

Le transport reste le premier secteur émetteur de GES en France, représentant environ 1/3 des émissions nationales. Si des progrès ont déjà été opérés entre les périodes 1990-2019 et 2019-2023 avec presque 50% des réduction des émissions du secteur, les efforts devront se poursuivre : la Stratégie nationale bas carbone vise une réduction de 70% des émissions de GES du secteur des transports en 2050 par rapport à 2013. Les enjeux sont environnementaux mais aussi sanitaires (qualité de l’air). Plus localement sur la Métropole grenobloise, la mise en place de la ZFE a permis une diminution de 25% des émissions de NOx, et de 28% et 38% de PM10 et PM2.5 respectivement.

A l’heure de la remise en cause des ZFE à l’échelle nationale, comment continuer à impulser et faciliter la dynamique de réduction et verdissement des véhicules dans les communes ?

Après un état des lieux sur le contexte national et local, trois communes ont témoigné de leur expérience sur le sujet de la réduction, verdissement, et facilitation au changement de comportement de leur flotte de véhicules.

ZFE et actions déployées par les communes sur leurs flottes de véhicules : panorama de situation

Les ZFE sur la Métropole : où en est-on ?

Yann Gerbeaux de la Métropole précise la situation locale au sujet des ZFE : ces dernières sont toujours en vigueur, et ce jusqu’à ce que la loi supprimant les ZFE soit promulguée. Actuellement, les décrets peuvent encore être supprimés par la commission paritaire ou dénoncés par le conseil constitutionnel comme cavalier législatif. Au-delà des contraintes nationales, le Plan de Protection de l’Atmosphère impose lui aussi à l’échelle locale un calendrier de déploiement des ZFE : l’assise législative pourrait ici aussi être remis en question.

Une prestation de conseil ouverte aux collectivités

Une prestation de conseil sur la transition des flottes de véhicules proposée aux professionnels du territoire, est ouverte aux collectivités. Pour toute question et détails, contacter Yann Gerbeaux (yann.gerbeaux@grenoblealpesmetropole.fr)

Quelles actions déployées par les communes de la métropole à ce jour ?

Sur la métropole grenobloise, les communes ont déjà agi sur le sujet de la réduction et du verdissement des véhicules communaux. Le bilan de l’engagement des communes dans le PCAEM 2020-2026 montre que sur les 31 communes étudiées, 15 ont mis en place une feuille de route de réduction de leur flotte de véhicules, et 18 en ont une pour le verdissement de leur flotte. A côté de ces stratégies, les actions de réduction, verdissement et accompagnement au changement recensées lors de ce bilan illustrent la diversité des solutions mis en place.

Aparté sur le rétrofit

Le retrofit reste une solution très peu employée sur notre territoire. En 2022, Grenoble Alpes Métropole a testé le retrofit avec Tolv (entreprise locale basée à Fontaine) sur un Renault Trafic utilisé pour les services de collecte et de tri des déchets qui avait 8 à 10ans d’ancienneté. L’autonomie du véhicule a été réduite à 100km, sa vitesse limitée à 100km/h, et le tractage n’est plus possible pour des raisons de capacité de freinage du véhicule. Les équipes bénéficient toutefois d’un confort de circulation, les émissions (GES et particules) sont réduites, et la collectivité a réalisé des économies substantielles par rapport à l’achat d’un véhicule neuf : le coût du rétrofit a représenté 27 000 € aides déduites contre environ 45 000 €HT pour un véhicule électrique similaire neuf. Après 3ans d’utilisation, la capacité de la batterie ne s’est pas dégradée (ou très faiblement). Cette solution doit être anticipée auprès des équipes pour éviter toute résistance et conserver un bon entretien du véhicule (précautions notamment sur la recharge).

Si le rétrofit se développe, plusieurs freins sont connus à sa généralisation : il existe encore peu d’entreprises réalisant le retrofit, relativement peu de modèles sont homologués (le retrofit n’est possible que sur des véhicules homologués, ce qui est long et couteux pour les entreprises réalisant le retrofit), et n’est autorisé que pour les véhicules ayant au moins 5ans d’ancienneté. En outre, l’intérêt économique de l’opération n’est pas encore assis, notamment pour les véhicules légers.

Etudes complémentaires sur le retrofit :

Retours d’expérience de 3 communes

CORENC - Témoignage de la réorganisation d’une flotte de véhicules

par Julien Calvez, Assistant administratif à la direction générale des services - julien.calvez@ville-corenc.fr

Jusqu’à peu, il n’y avait pas de suivi régulier sur l’entretien et l’utilisation de la flotte de véhicules de la ville. La responsabilité de l’entretien étant diluée entre les différents usagers, il y avait beaucoup de défauts, dont de sécurité, et de mécontentements notamment sur le confort d’utilisation.

En parallèle, plusieurs évènements ont contribué à une réflexion sur la réorganisation de la flotte. En outre, un véhicule qui n’est pas passé au contrôle technique et dont les réparations étaient trop couteuses, et la possibilité de convertir un véhicule 2 places en 5 places (2000€).

Ainsi :

  • des responsables ont été désignés pour le suivi de chaque véhicules : ces derniers se sentent plus investis sur le sujet. Il en résulte une grande satisfaction : confort d’usage, véhicules mieux entretenus et plus sécurisés,
  • le nombre de véhicules est passé de 14 à 12,
  • un calendrier partagé (outlook) a été mis en place pour les réservation des véhicules partagés entre services. Les clés des véhicules sont centralisées à l’accueil.

Par ailleurs, la commune témoigne d’une réussite : une dynamique de covoiturage mise en place et entretenue par et pour les agents périscolaires. Les écoles de la ville étant éparpillées et certains agents n’ayant pas le permis de conduire, le véhicule de la « réussite éducative » fonctionne depuis plusieurs années. Récemment, son utilisation a pu être optimisée en le laissant à disposition d’autre agents le mercredi (jour non travaillé pour le personnel de la réussite éducative).

Les prochaines étapes pour Corenc ?

  • Un suivi de l’utilisation des véhicules pour repérer les pistes d’optimisation (suppression, mutualisation,…),
  • Se détacher de plus en plus de la conception du véhicule attitré et aller vers le véhicule partagé, et ce via la mise en confiance sur le suivi et la réservation des véhicules.

VOIR LA PRESENTATION DE CORENC

FONTAINE - Témoignage du verdissement d’une flotte

par David Gonnelaz, Chargé de mission énergie, Responsable fluides, maintenance et travaux CVC - david.gonnelaz@ville-fontaine.fr

À la suite d’un inventaire des VUL crit’air 3 concernés par la restriction ZFE, la ville de Fontaine opte pour le changement de 17 de ses véhicules.  11 d’entre eux seront remplacés par de l’électrique, les 6 autres en gaz. Cette évolution a représenté un investissement de 665 000 €HT (dont 390 000€ de subventions). Plusieurs bornes de recharge ont été installées, principalement au niveau du centre technique municipal où se trouve la majorité des véhicules. Certaines bornes sont situées en intérieur pour les quelques véhicules qui restent chargés d’outillages (afin d’éviter tout vol).

Outre les VUL, la commune témoigne de la difficulté de remplacement des poids lourds (pour l’instant en dérogation ZFE dans leur cas) où le passage à l’électrique est très coûteux pour un faible kilométrage, et la possibilité de carburation au B100 a été abandonnée par problématique d’approvisionnement.

La suite pour la ville de Fontaine ?

  • Restent à ce jour 17 véhicules concernés par le calendrier ZFE. La conversion de cette flotte représenterait un investissement de plus d’1million€. Quid de la politique volontariste de ces dernières années en parallèle de la remise en cause des ZFE et des tensions budgétaires ?
  • Des marges de manœuvre sont encore à chercher du côté de l’optimisation de la flotte. Un système de suivi du kilométrage et des usages est réalisé au moment de la recharge de tout véhicule (via carte carburant, code par usager, et logiciel Atal). Ceci permet d’évaluer l’utilisation de chaque élément de la flotte. Dernièrement, ce suivi a permis de se défaire de 10 véhicules.
  • Un potentiel à aller exploiter sur le passage des mobilités « voiture » vers les mobilités « vélo » (exemple du menuisier de la ville à l’appui)

VOIR LA PRESENTATION DE FONTAINE

SAINT-MARTIN-D’HERES - Témoignage de l’importance d’un accompagnement au changement de mobilité

par Julien Ferry, Économe de flux et chef de projet climat/énergie - julien.ferry@saintmartindheres.fr

 

Saint-Martin-d’Hères a dessiné une feuille de route de réduction et verdissement de la flotte. Le projet ambitieux a combiné :

  • la suppression d’une 40aine de voitures,
  • une forte conversion du parc en électrique (+40%),
  • une forte augmentation du vélos,
  • une augmentation du nombre de véhicules mutualisés (dont le nombre a été dimensionné par service)
  • un changement de modèle de ces véhicules mutualisés (VUL classiques en AMI)
  • Afin de permettre aux agents de réaliser des déplacements longs (ne pouvant être réalisés en AMI), l’accès à des véhicules de prêts a été facilité.

Du fait d’un manque de concertation des équipes, les agents ont été réticents à ces changements d’ampleur. Ainsi, Saint-Martin-d’Hères observe à ce jour un report important sur les véhicules de prêt, et une augmentation du kilométrage parcouru en voiture ! Alors que des AMI pourraient être utilisés, beaucoup d’agent choisissent de réserver un véhicule de prêt. Plusieurs agents préfèrent aussi utiliser un vélo plutôt qu’une AMI.

Si l’utilisation des AMI par les agents est à améliorer, certaines professions s’en sont largement emparé. C’est le cas des Aides à domicile qui utilisent ces véhicules pour leurs déplacements quotidiens.

La suite pour Saint-Martin-d’Hères ?

  • Poursuivre les formation et sensibilisation des agents à l’utilisation des AMI
  • Former les mécaniciens aux véhicules électriques

VOIR LA PRESENTATION DE SAINT-MARTIN-D'HERES

Clés de réussite et points de vigilance

En conclusion, les participants ont chacun énoncé un élément clé de réussite de transition d’une flotte de véhicule communale ressortant de l’atelier. En voici l’aperçu :

Accompagner le changement

  • Anticiper
    • Raisonner par pool d’utilisateurs : distinguer ceux qui ne peuvent pas se passer de véhicules de ceux qui le peuvent, et être à l’écoute des besoins de chaque agents avant d’agir.
  • Préparer le changement
    • Être transparent sur les raisons des orientations choisies,
    • Former et sensibiliser : prendre en main un véhicule électrique, conduire à vélo, séparer l’homme de la voiture / déviriliser l’usage de la voiture, transmettre les bonnes pratiques d’usage et entretien des véhicules, expliquer les nouveaux systèmes de réservation en place,
    • Généraliser des périodes test pour faciliter adhésion à une nouveauté.
  • Entretenir la dynamique
    • Responsabilisation des utilisateurs de véhicules pour un meilleur entretien,
    • Faire un reporting régulier auprès des agents sur l’utilisation de la flotte de véhicules et valoriser les économies faites via la réduction du nombre de véhicules (et comment ces économies sont réemployées),
    • Un responsable disponible capable d’écouter les besoins et répondre aux questions.

Organiser la flotte

  • Un logiciel de réservation performant et de récupération des clés pratiques pour les agents,
  • Une répartition des véhicules appropriée selon la localisation des services et le nombre d’usagers,
  • Un suivi de l’usage des moyens de déplacements afin d’optimisation en continue les moyens de déplacement : inclus le vélo sur lequel le report modal est peu observé et le suivi absent.

Autres informations échangées lors de l’atelier

  • L’AMI : un potentiel de développement / attractivité de certains métiers pour des personnes qui n’auraient pas le permis de conduire
  • Cas particulier des véhicules de la police municipale qui se détachent du reste de la flotte de part leur kilométrage annuel, et le besoin de robustesse sur différents points tel que le gabarit suffisant (gilet, chien…), une bonne autonomie et de la réactivité. Une commune témoigne d’une Zoé mis à disposition de la police municipale qui n’a « jamais » été utilisé.
  • Meylan et Saint-Martind'Hères sont en réflexion pour lier les consommations des véhicules électrique à de l’autoconsommation collective de production PV de bâtiments communaux. L’intensification des usages est nécessaire pour rentabiliser les installations PV. Un parallèle peut être fait avec l’intensification de l’électrification des l’outillage/petits équipements tels que souffleurs à feuilles, tondeuses,… (à Meylan, 1/3 du carburant est utilisé dans cet outillage),
  • Possibilité de partage de la flotte d’AMI avec Citiz les week-end,
  • Vigilance sur le carburant B100 (carburant végétal), considéré comme vert, équivalent au diesel sur la qualité de l’air (plus d’information sur l'analyse de la DGE sur les alternatives au diesel pour les poids lourds),
  • 2027 : mise en place de la taxe carbone européenne ETS2 qui va générer une augmentation des coûts des carburants fossiles.